théâtre craie

Une machine théâtrale...

Marie Beer / www.lecourrier.ch / 15 février 2012

GENEVE • A la fois virtuose et hermétique.
Dans la lumière de la salle, une voix jaillit soudain qui nous force à nous taire, et nous renvoie sur les bancs des cours de sciences auxquels on ne comprend rien. (...)
On se laisse d’abord entraîner par le miracle d’un flot lisse et musical de paroles absconses. On plonge ensuite sous terre, au centre d’une machine scientifique où tout pose question : la matière, la météo, les portes sorties de leur cadre, puis l’homme, la femme, leur condition et l’harmonie des corps. Les membres de l’équipe des Terriens se heurtent les uns aux autres, cherchant leur place, explorant les limites de leur propre univers. Artistes de cirque, musiciens et comédiens brillent d’un feu incandescent dans la pénombre de la scène. Ils créent tous ensemble la matière sonore. D’une seule note tenue le long d’un archet jaillit plus loin une chanson qui se construit, s’enrichit, à mesure que chacun y apporte sa contribution. Les considérations les plus triviales rencontrent les énigmes fondamentales de l’être. Tout est interrogé sur le même plan, avec la même distance, avec la même certitude que tout peut être décrit, expliqué, chanté au moins – et qu’on peut ainsi s’approprier ce qui nous échappe. (...)
Par chance, le texte entier – y compris l’admirable charabia – est porté par la musique de Radoslaw Klukowski et son groupe Slash/Gordon, et par un solide duo de comédiens (Colline Caen et Stéphane Bernard) qui, faisant corps avec le texte, parviennent à nous émouvoir jusqu’à la fin.


Le grand collisionneur

(...) il s’agissait d’une expérience originale, voir originelle après un séjour au CERN de Genève ou se trouve le plus puissant accélérateur de particules au monde : le grand collisionneur. "En raisonné poétique et musical j’écris d’emblée dans l’impossible, sous l’influence, le cerveau mode fantastique" confie Claire Rengade et son spectacle déstructuré, récusant la notion traditionnelle de personnages et refusant de se plier à une continuité dramatique, s’interroge sur le temps, donc sur l’être et sa place dans l’univers, notant au passage "le monde est fabriqué par des gens qui ne réfléchissent pas beaucoup".
Le Dauphiné Libéré, le 19/01/12


Temps de parole

(...) Avec "les Terriens", Claire Rengade a donc fabriqué un machine "pour le temps que l’on n’a pas. Cirque, danse, musique, théâtre, ce spectacle mêle tous les arts, dans un but : "que le spectateur comprenne ce qu’il veut comprendre. J’aime quand on lui laisse la liberté de percevoir les choses comme il l’entend".
Propos recueillis par Clément Berthet, Le Dauphiné Libéré, le 15/01/12


Claire Rengade revient sous terre

...491, Etienne Faye, décembre 2011

Les Terriens. Le titre pourrait paraître ambitieux, Les Terriens, mais c’est une sorte de constat, nous, les humains, sommes destinés à la terre, et même six pieds dessous. C’est donc sous la surface que Claire Rengade a imaginé Les Terriens, sous-titré Assurez-vous que vous faites totalement autre chose. Il s’agit d’un récit fantastique, dont le décor ressemble trait pour trait à un accélérateur de particules, une grosse machine à fabriquer du temps, et dans laquelle chaque humain aurait une tâche précise, mais sans avoir la moindre idée de l’ensemble, ni du but poursuivi. Claire Rengade nous confie s’être inspirée directement du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire, qui tient son acronyme de son ancien nom, le Conseil européen pour la recherche nucléaire), qu’elle a pu visiter longuement, dont elle a pu interroger les scientifiques ou les techniciens : “Nous avons voulu faire une sorte de biopsie de ce monde particulier, dit-elle, un monde qui possède son vocabulaire propre” et qui, pour une néophyte comme elle, était déjà un langage de science-fic-tion...


Claire Rengade, auteur, metteur en scène qui dirige la compagnie théâtre craie depuis 1996, aime construire des fictions sur des thèmes d’actualité ici et maintenant à partir de la parole des gens vivants sur des territoires géographiques réels.
Les terriens est votre dernière création présentée à Château Rouge ?
Notre création, car notre travail est aussi collectif, avant l’écriture précède l’immersion de la troupe sur le lieu où nous sommes, depuis deux ans nous sommes en résidence à Château Rouge et nous avons procédé à des cueillettes (informations récits témoignages toutes générations confondues) à cela s’est ajouté par hasard la découverte du CERN, énorme machine consacrée à la physique et l’accélération des particules, composé de personnes distinctes de métiers et d’origines très différentes. De l’étude de ces deux territoires géographiques et humain, le Perrier et le CERN est née "les terriens"
Pouvez-vous nous dire ce que veulent montrer "les terriens" ?
Nous suggérons à l’aide des mots, du texte (mon écriture), des sons des objets (Laura Tejeda) de la musique (Radoslaw Klukowski), des musiciens et comédiens d’évoquer des liens possibles entre une machine à remonter le temps et qui accélère le processus pour arriver au Big Bang et la propre accélération de nos vies suggéré par les vois de différentes générations que nous avons consultées. De tout ce chaos, ces temporalités se télescopent ici et maintenant au sein de cette machine à étages toujours en marche peuplée sous terre d’une humanité laborieuse en quête des origines de début ou de fin du monde social, intime ou universel.
Propos recueillis par Le Dauphiné Libéré, le 13/11/11


La création Les terriens, imaginée et mise en scène par Claire Rengade et portée par des comédiens et musiciens jubilatoires, était mercredi soir à Château Rouge une belle expérience théâtrale à partir d’un vécu au centre de physique du CERN et de son accélérateur de particules. En nous immergeant ans l’énorme machine à remonter le temps tout en l’accélérant, les comédiens ont permis de voir en séquences précises et poétiques les paramètres scientifiques de l’être humain dans son ubiquité, son charme et sa fusion. Tout en paroles nerveuses et musiques chahutées, c’est un système de production qui a été dévoilé.
Le Dauphiné Libéré, 18/11/11


C’est avec des conversations ordinaires et prosaïques glanées dans les couloirs du CERN que Claire Rengade a écrit son spectacle "Les terriens (assurez-vous que vous faites totalement autre chose)". Elle les a mixées, broyées puis remontées selon un désordre savant. Il en ressort une pièce étrange, d’une force poétique indéniable, qui élève la banalités des considérations quotidiennes (sur le fonctionnement médiocre de l’ascenseur, de délais à tenir, le temps qui passe et le système idiot de rangement des bureaux) au rang d’un oratorio surprenant. Ces échanges s’incarnent grâce à des comédiens facétieux et énergiques emmenés par l’excellent Stéphane Bernard. Le sens général nous échappe la plupart du temps mais l’on est saisi par ces petits bouts d’histoires qui s’emboitent, que l’on surprend comme à la dérobée. L’humour fait également mouche. Il est créé par le décalage des paroles et la façon faussement indifférente ou au contraire exagérée, de les interpréter. La langue devient une musique portée par des instruments qui jaillissent d’un décor abstrait et changeant. Bref, ces "terriens" méritent d’être rencontrés.
Le Progrès, le 3/12/11


Claire Rengade l’invitée du mois d’octobre 2010 du ...491

Le CERN, c’est incidemment que nous y sommes allés...
- ...491, octobre 2010 - [voir l’article]

Les terriens {assurez-vous que vous faites totalement autre chose}

2011